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hebdomadaire et nos rapports
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Marché Art Africain 2014 - Afrique de l’Est
Paradoxalement, l’Afrique de l’Est a une scène artistique moins active que les autres régions du continent, même si elle est la patrie de plusieurs artistes africains contemporains de renommée mondiale, notamment Julie Mehretu, Wangechi Mutu et Georges Lilanga.
Le pays d’Afrique de l’Est le mieux positionné dans le domaine artistique est le Kenya, où a été créée la première agence artistique indépendante d’Afrique de l’Est. The Circle Art Agency promeut et soutient le marché de l’art contemporain africain en exposant des artistes et en organisant des enchères publiques. Elle est également l’administratrice de The African Arts Trust, fondé en 2011 par Robert Devereux, collectionneur, philanthrope et ancien partenaire de Virgin. En 2013 et 2014, l’agence organisa les deux premières enchères publiques d’art contemporain Est-Africain. La dernière, en novembre 2014, présentait des œuvres du Kenya, de Tanzanie, d’Ouganda, d’Éthiopie et du Soudan, couvrant la période de 1970 à 2014. Cette vente aux enchères a rapporté 18,8 millions de shillings kényans (210 000 dollars) et 87% des lots ont été vendus. Toujours au Kenya, l’artiste multidisciplinaire Jimmy Ogonga a créé le Nairobi Art Trust/Centre for Contemporary Art of East Africa (CCAEA) en 2011. L’organisation s’est engagée à développer l’art contemporain et la culture en Afrique de l’Est. Le Changamoto Arts Fund est le fruit d’un partenariat entre la Kenya Community Development Foundation et le Go Down Arts Centre, avec un financement de la Ford Foundation. Ce fonds artistique vise à créer de nouveaux publics pour les arts tout en enrichissant le secteur culturel kenyan et en soutenant économiquement les artistes kenyans dans les domaines du théâtre, de la danse, de la musique et des arts visuels.
Paradoxalement, l’Afrique de l’Est a une scène artistique moins active que les autres régions du continent, même si elle est la patrie de plusieurs artistes africains contemporains de renommée mondiale, dont Julie Mehre-tu, Wangechi Mutu et Georges Lilanga.
La Tanzanie, qui est la patrie de l’artiste Georges Lilanga, compte plusieurs initiatives innovantes. À Dar es Salaam, l’espace Nafasi Art, fondé en 2010 avec la coopération de l’ambassade du Danemark, est dédié à la création contemporaine. Il accueille 15 artistes tanzaniens et propose des résidences à des artistes internationaux. La Biennale d’Afrique de l’Est est une organisation non-gouvernementale à but non lucratif, lancée en janvier 2003, dont le siège est à l’université de Dar es Salaam. Elle assure la promotion des artistes d’Afrique de l’Est en diffusant des informations sur leur production auprès des acteurs du secteur artistique. La biennale expose des œuvres d’artistes Est-Africains et dispose également d’un espace dédié aux artistes du monde entier.
Kenya
Vue d’ensemble
par Osei Kofi
L’art en Afrique de l’Est est sans doute le plus professionnalisé du continent, hormis l’Afrique du Sud. On y trouve une profusion de genres imprégnés d’art traditionnel, moderne et d’avant-garde ; des œuvres créées sur toile, cuir, en batik, en argile, en verre, en marbre, en pierre tendre, en granit et avec de la ferraille ; sans oublier des gravures, lithographies et photographies.
Depuis la naissance de l’art contemporain dans les années 1960, le Kenya a ouvert la voie aux artistes de la sous-région. Nairobi reste un centre privilégié pour les artistes burundais, éthiopiens, rwandais, soudanais, tanzaniens et ougandais, qui peuvent y présenter leurs meilleures œuvres et en tirer des prix élevés. Des centres d’art incubateurs tels que le Go Down, le Kuona Trust et les sections d’art contemporain du Musée national proposent des séminaires, des tutoriels, des studios loués, des expositions, des retraites artistiques et des résidences. Chaque année, des artistes Est-Africains partent en résidence, principalement en Europe et en Amérique du Nord. Les synergies qu’ils acquièrent à l’étranger se reflètent dans le professionnalisme de leur travail.
La vitalité de l’art d’Afrique de l’Est repose sur le succès de trois générations d’artistes à plein temps, allant des icônes octogénaires aux adolescents plein de cran. Parmi les anciens, on trouve Jak Katarikawe, maestro autodidacte surnommé le « Chagall de l’Afrique » pour ses récits naïfs et oniriques. Né en Ouganda, Katarikawe est l’artiste le plus apprécié d’Afrique de l’Est car son œuvre est reconnue et bankable. Premier Africain à pouvoir se vanter qu’une de ses peintures est accrochée au Kremlin, Katarikawe a exposé dans le monde entier et remporté une série de prix. Le Museum für Volkerkunde de Hambourg possède à lui seul une collection de 140 œuvres de Katarikawe. Son catalogue raisonné sur Katarikawe est le premier du genre sur un artiste d’Afrique de l’Est.
Les commissaires de musée et les collectionneurs privés n’ont que l’embarras du choix parmi les sculptures monumentales en pierre, en marbre et en granit d’Elkana Ong’esa, Gerard Motondi, Samuel Wanjau, John Dianga et Gakunju Kaigwa. Ils ont l’embarras du choix avec l’esthétique néo-chagallienne de Jak Katarikawe, le grotesque horrifiant et les chroniques brutales de Wanyu Brush et John Yoga, l’art brut de Sane Wadu, Eunice Wadu et Francis Kahuri ; le romantisme pastoral de Camille Wekesa, Yoni Waite et Geoffrey Mukasa ; les vitraux de Nani Croze ; les rendus très inspirés d’Eduardo Saidi Tingatinga, George Lilanga, Kivuthi Mbuno et Richard Onyango ; les choix socio-politiques modérés de Rashid Diab, Maria Kizito Kasule, David Mzuguno, Anne Mwiti, Jus tus Kyalo, Sophie Walbeoffe, Ssali Yusuf, Anwar Nakibinge, Meek Gichugu, Collin Sekajugo, Peterson Kamwathi, Samuel Githui, Joseph Bertiers, Michael Soi, Leonard Ngure, Kamau « Cartoon » Joseph – et des centaines d’autres.
Plusieurs galeries ont vu le jour dans la région au début des années d’indépendance, dans les années 1960. La plupart n’ont pas survécu. La galerie Watatu de Ruth Schaffner, qui pendant un temps représentait 150 artistes, a prospéré pendant plus de 42 ans mais a fermé en 2012 après le décès de son propriétaire Adama Diawara. Le RaMoma a fermé ses portes en 2010.
En 2013, Circle Art Agency (CAA) renaquit de ces cendres de Gallery Watatu et du RaMoma avec un programme passionnant d’art « pop-up », exposant dans des bureaux d’entreprise et des résidences privées. La première et la deuxième enchère publique d’art moderne et contemporain d’Afrique de l’Est de la CAA, à Nairobi en novembre 2013 et 2014, ont été très suivies, avec 90 % des lots vendus chaque fois, et des recettes de 210 000 dollars en 2013 et 230 000 dollars en 2014. Même si ces chiffres sont dérisoires au niveau international, ils marquent un début prometteur. Le succès de CAA est en partie dû au professionnalisme de ses fondateurs, dont certains ont une expérience de la scène Londresienne de l’art moderne et, plus important encore, encouragent les sociétés commerciales à s’intéresser au patronage artistique. Dans les années 1980, la galerie Watatu s’était battue sans succès pour que des banques et d’autres entreprises sponsorisent des enchères publiques d’art. Il est clair qu’en Afrique de l’Est l’idée était en avance sur son temps.
Dans cette région, le mécénat artistique reste très largement l’affaire des expatriés. Les Africains autochtones représentent, peut-être, 5 à 10 % des acheteurs d’art. Toutefois, la situation évolue rapidement, car de plus en plus d’Africains, tant des particuliers que des entreprises, commencent à collectionner sérieusement.
Osei Kofi
Dans cette région, le mécénat artistique reste très largement expatrié. Les Africains autochtones représentent, peut-être, 5 à 10 % des acheteurs d’art. Toutefois, la situation évolue rapidement, car de plus en plus d’Africains, tant des particuliers que des entreprises, commencent à collectionner sérieusement.
Parmi les collections notables d’art contemporain Est-Africain, citons celles de Jean Pigozzi, Sindika Dokolo, Isaia Mabellini-Sarenco, Osei G., Marc van Rampelberg, Yoshio Ishida, Manu Chandaria, Samuel K. Macharia, Sandeep Desai, Robert Devereux, Patrick Quarcoo, Nani Croze, Elimo Njau, Anthony Athaide, Joydeep Guha, Michael Drechsler, Jochen Zeitz, Chris Kirubi, Andrew Njoroge, Mary Collis, Paul Kavuma et Tony Wainaina.
George Hughes, Scream, 2010