hebdomadaire et nos rapports
2015 : Les initiatives & Investissements du
marché mondial de l'Art Africain
LES COLLECTIONNEURS DU MILLENAIRE
Theo Danjuma
Collectionneur,
Londres
Theo Danjuma commença sa collection à Londres en 2008, alors qu’il n’avait qu’une vingtaine d’années. Fils du général et homme d’affaires nigérian Theophilus Danjuma, il a acquis plus de 400 œuvres signées par plus de 100 artistes et abrite sa collection dans le Surrey, en Angleterre. Sa collection comprend des œuvres d’artistes internationaux tels que Gilbert & George et Antony Gormley, ainsi que des talents émergents tels que Nicholas Hlobo d’Afrique du Sud et Sammy Baloji de la République démocratique du Congo. Sa vaste collection d’art contemporain reflète également les liens familiaux de Danjuma avec le continent africain.
“En 2007, j’ai commencé à fréquenter les galeries avec un ami, en me concentrant au départ sur les jeunes galeries, qui présentaient surtout du street art. À partir de là, je suis tombé dans ce monde artistique nouveau pour moi, et me suis formé pour passer au plus sérieux art contemporain. Je serai toujours reconnaissant à White Cube, qui me fit le meilleur accueil : il me donnait des catalogues à lire et m’emmenait visiter des studios, alors que d’autres galeries ne me prenaient pas au sérieux à cause de mon âge. Si mes souvenirs sont exacts, la première œuvre d’un artiste africain que j’ai achetée était une photographie de Pieter Hugo.
L’art contemporain parle de notre époque, et la nôtre est tellement globalisée que toute forme de concentration géographique serait arbitraire et peu sincère. Je suis très fier du petit dessin de Julie Mehretu que je possède ; le travail de Lynette Yiadom-Boakye me parle de manière très directe et personnelle ; Nicholas Hlobo est un artiste merveilleux, tout comme Zander Blom et Neil Beloufa. J’ai eu le privilège de connaître Neil personnellement et de soutenir ses expositions à l’ICA de Londres.
Cette photographie en noir et blanc d’Isa Genzken réalisée par Wolfgang Tillmans dans les années 1990 est la dernière pièce que j’ai acquise. Vraiment magnifique, elle met en évidence le lien entre ces artistes et leur respect mutuel. Je me concentre principalement sur les artistes dont je possède déjà certaines œuvres et j’essaie d’approfondir, quand je le peux. Pour certains artistes – Tillmans en est un bon exemple – la réception critique est très en avance sur le marché. Pendant un certain temps, je me suis concentré sur les jeunes artistes. Mais j’apprends… et je constate que l’histoire de l’art décrit un arc immense : je revisite donc des artistes de la génération qui me précède, comme Isa Genzken, Albert Oehlen et Kathryn Andrews.
Stevenson (au Cap et à Johannesburg) ainsi que Jack Shainman (à New York) sont les galeries les plus indiquées pour trouver des œuvres d’artistes africains ou d’origine africaine. Mais il arrive souvent que des galeries n’aient qu’un seul artiste ayant un lien avec l’Afrique, comme Lynette Yiadom-Boakye chez Corvi-Mora à Londres ou Neil Beloufa à la galerie Ghebaly à Los Angeles.”
Stephen Tio Kauma
Collectionneur, Kampala
Stephen Tio Kauma est un collectionneur ougandais d’art contemporain d’Afrique, basé au Caire. Il est un fervent partisan de la Biennale de Kampala, dirigée par Daudi Karungi et dont l’édition 2016 était placée sous le commissariat d’Elise Atangana.
“Mon intérêt pour l’art a commencé dans mon enfance car mon père, au goût éclectique, aimait collectionner des œuvres pour notre intérieur. Son travail l’amenait à voyager beaucoup en Afrique et notre maison comportait donc des pièces provenant de différents lieux africains. J’aime l’unicité, la vivacité et le message qui se cachent derrière ce type d’art, car il capture la profondeur et la particularité de notre héritage africain.
Je suis très fier d’être africain et ces attributs résonnent donc en moi.
Mon poste de directeur des ressources humaines à Afreximbank, banque africaine d’import-export dont le siège est au Caire, m’a permis de voyager dans toute l’Afrique au cours des sept dernières années. Lorsque je suis dans d’autres pays, j’essaie de visiter des galeries d’art et des expositions d’art contemporain, si mon emploi du temps le permet. La beauté des différents types d’art que j’ai vus au cours de ces voyages m’a donné l’occasion de rassembler des objets. Chaque œuvre que j’achète me ramène à une époque, une expérience et un lieu particuliers.
Je possède des œuvres du Nigéria, d’Éthiopie, d’Ouganda, du Kenya, du Zimbabwe, de Zambie, d’Afrique du Sud, du Gabon, de Tanzanie, d’Égypte et des Seychelles. Il s’agit généralement d’œuvres à prix moyen réalisées par des artistes contemporains en devenir. Mes deux derniers achats sont une lithographie signée de Benon Lutaaya, un artiste d’origine ougandaise établi à Johannesburg, et une aquarelle de Lioda Conrad, artiste établie au Cap. J’ai l’œil sur deux artistes ougandais, Taga Nuwagaba et Nuwa Nnyanzi, entre autres. “
FONDS D’INVESTISSEMENT DU BLACK COLLECTORS FORUM A JOHANNESBURG, AFRIQUE DU SUD
Le Black Collectors Forum (BCF) est né en 2014, à l’initiative de Tshepiso Mohlala, directeur du projet d’art contemporain africain !Kauru à Johannesburg. Le BCF affirme être la seule plateforme d’Afrique du Sud à s’adresser à de nouveaux publics, notamment les professions libérales noires aisées et jeunes. Elle vise à améliorer leur accès à l’art contemporain grâce à ce qu’elle décrit comme des événements de « courtage culturel », destinés à guider les nouveaux acheteurs et à les initier à l’achat d’œuvres d’art.
L’événement autour du lancement du BCF, qui s’adresse aux personnes noires aisées et aux professionnels du secteur, a été organisé par Andile Magengelele, curateur indépendant et courtier en art. Il a invité plusieurs intervenants : Makgati Molebatsi (collectionneur d’art et membre du conseil d’administration de The Bag Factory Artist Studios) ; le Dr Oupa Morare (collectionneur et directeur du Becomo Art Centre) ; Michelle Constant (PDG de Business Arts Afrique du Sud); Ruarc Peffers (ancien spécialiste en chef de l’art contemporain chez Strauss & Co., maison de vente aux enchères) et Sam Nhlengethwa (artiste et collectionneur).
La motivation du BCF reflète les changements intervenus dans l’Afrique du Sud postapartheid, qui ont conduit à l’émergence d’une classe moyenne noire disposant d’un revenu disponible plus important. Le BCF a été créé pour soutenir cette génération de nouveaux collectionneurs d’art noir et les encourager à investir dans l’art contemporain africain.
L’un de ses principaux objectifs est d’élargir le public des arts et développer les marchés potentiels pour inciter à apprécier, acquérir et investir dans les arts visuels. Ce projet s’inscrit dans le droit fil du projet d’art contemporain africain !Kauru – plateforme dédiée aux artistes contemporains africains et aux professionnels de la culture – qui vise à modifier la perception du continent par le biais de conversations sur l’art contemporain, tant en Afrique qu’à l’étranger, afin de stimuler les échanges culturels.
Derrière le BCF et !Kauru se cache la conviction que les entrepreneurs noirs doivent être impliqués dans la scène artistique de leur pays. En effet, le site web comporte une citation de l’artiste sud-africain David Koloane, qui affirme : les entrepreneurs noirs africains devront jouer un rôle majeur pour répondre aux complexités du marché de l’art.
FONDS D’INVESTISSEMENTS EN ART
Nahim Suti
Directeur général de First Finance, Abidjan
Puis-je vous demander de nous citer les noms de certains des artistes africains de votre collection ?
Principalement, Ablade Glover du Ghana, Ludovic Fadaïro du Bénin, Christophe Sawadogo et Vivien Tapsoba du Burkina Faso, Ulliette Balliet du Togo, et Moné Bou, Youssouf Bath, Augustin Kassi, Soro Péhouet, Bamogo Séni, Aboudia, Blacaus, Samir Jacques Stenka de Côte d’Ivoire.
Quand avez-vous commencé à acquérir des œuvres d’art et quels ont été les premiers artistes dont vous avez acquis les œuvres ?
C’était en 2005 et il s’agissait essentiellement de jeunes artistes qui avaient fréquenté l’École Nationale des Beaux-Arts d’Abidjan. J’ai découvert leurs œuvres par l’intermédiaire de Houkami Guyzagn, alors jeune galeriste représentant des artistes émergents de Côte d’Ivoire. Cela m’a permis, lorsque j’ai ouvert mon entreprise de microfinance en 2009, de créer une structure connexe appelée West African Private Equity (WAP’ART), axée sur la négociation et le rôle d’intermédiaire pour l’acquisition d’œuvres d’art.
Envisagez-vous d’acquérir davantage d’œuvres d’artistes africains ?
Bien sûr, et surtout nous diversifier au-delà de la région ouest-africaine. Nous avons l’intention de nous intéresser à des artistes d’Afrique centrale et d’Afrique du Sud, etc.
Quels sont les artistes qui vous intéressent et ne sont pas encore représentés dans votre collection ?
Des artistes de la diaspora ivoirienne comme Ouattara Watt et Ernest Düku ; des pionniers ivoiriens comme Michel Kodjo, Frédéric Bruly Bouabré et James Houra ; l’artiste malien Abdoulaye Konaté ; l’artiste burkinabé Ky Siriki ; ainsi que de nombreux autres artistes sénégalais, et peut-être ceux d’Afrique du Nord.
Que pensez-vous de l’essor du marché de l’art contemporain africain ?
Ce boom reflète l’essor de la classe moyenne, qui est dopée par les Africains de la diaspora, parce que, lorsqu’ils reviennent sur le continent, ils sont sensibilisés à l’art.
Vous êtes financier, que faites-vous pour contribuer à l’essor de l’art contemporain ivoirien ?
Dans ma société de microfinance, par exemple, nous acceptons comme valeurs refuges l’or, l’immobilier, les actions de sociétés cotées en bourse et aussi les œuvres d’art, même si les quotas d’artistes ne sont pas établis de manière rigide. En ce sens, nous avons expérimenté la création d’un marché secondaire. Concrètement : au début, nous avons acquis des œuvres d’art que nous considérions comme prometteuses. Nous les avons documentées, puis les avons revendues au double, voire au triple, du prix auquel nous les avions achetées, afin d’acquérir d’autres œuvres d’artistes mieux cotés.
Brett Scott
Responsable de la collection, Scheryn Art Collection, Le Cap
Le fonds Scheryn Art Collection, au Cap, a été fondé en 2015 par deux entrepreneurs, Herman Steyn et Dabing Chen. Il achète des œuvres d’artistes d’Afrique et de la diaspora africaine, à l’intention des collectionneurs qui en retirent des avantages monétaires et non-monétaires également.
“Quand la Scheryn Art Collection a été créée, c’était la première collection d’art dédiée à l’Afrique en vue d’offrir aux collectionneurs l’opportunité de contribuer à l’essor de l’art africain. L’art du continent africain devient de plus en plus populaire et les cinq à dix prochaines années verront la demande s’accroître. Notre collection est le fruit d’une collaboration entre spécialistes expérimentés du marché de l’art et conseillers en investissement professionnels qui ont une passion toute particulière pour l’art. Grâce à diverses initiatives de soutien, Scheryn encourage les jeunes talents artistiques et préserve l’héritage culturel de l’art africain tout en offrant aux collectionneurs des récompenses esthétiques et une valorisation du capital à long terme. Nous sommes convaincus de la force et de la diversité culturelle de la production artistique du continent et de la façon dont elle remet en question les normes établies de l’art contemporain.
Une plateforme mondiale a été créée pour permettre aux artistes africains de présenter leurs œuvres à un public international et les artistes qui utilisent des techniques tant traditionnelles que de pointe sont de plus en plus recherchés. Les artistes locaux qui n’ont pas encore acquis une reconnaissance internationale sont les plus intéressants à observer.
Cela s’explique par la demande des communautés internationales d’expatriés, qui recherchent des artistes de leur pays d’origine, et celle des acheteurs mondiaux, en quête de nouvelles tendances. Les prix de l’art africain se sont appréciés sur le marché secondaire, du fait de l’intérêt croissant du marché primaire pour l’art africain contemporain. Le déploiement de la foire d’art 1:54 à New York et l’intérêt récent de l’Armory Show pour le continent africain en sont de parfaits exemples. La croissance du marché de l’art ghanéen a également attiré notre attention.
Nous avons actuellement trois collectionneurs. Scheryn recherche des amateurs qui partagent notre passion pour la durabilité du marché de l’art africain. Ils sont conscients que rejoindre la collection implique un engagement à long terme, car la spéculation, la revente ou le commerce d’œuvres d’art ne nous intéressent pas. Nous recherchons des collectionneurs qui ne savent pas par où commencer ou qui manquent d’expérience en matière d’art contemporain africain. Nous recherchons également des personnes qui possèdent déjà des collections, mais n’ont peut-être pas assez de temps ou d’argent pour les gérer correctement. Nous leur offrons la possibilité de bénéficier du retour esthétique et financier de leur collection, sans les soucis administratifs.
L’ouverture du Musée Mohammed VI d’art moderne et contemporain à Rabat, au Maroc, en 2014, et du Zeitz Museum of Contemporary Art Africa au Cap en 2017 sont des développements importants. Disposer de deux musées répondant aux normes muséales internationales en Afrique du Nord et en Afrique australe est un grand pas sur la voie de la consolidation de la place de l’Afrique dans le monde de l’art. Cela garantira que la poussée de fièvre en faveur de l’art africain sera durable, et non une fascination éphémère. Cependant, il sera difficile d’ignorer l’impact du Brexit, Londres étant un marché majeur pour l’art africain. Il faudra attendre deux ou trois ans pour ressentir les conséquences du Brexit. “
Serge Tiroche
Cofondateur du fonds d’investissement Art Vantage PCC Limited
Serge Tiroche a cofondé la Tiroche DeLeon Collection avec Russ DeLeon en 2011 dans le but de se concentrer sur les marchés de l’art contemporain dans les pays en développement. La collection est détenue par Art Vantage PCC Limited, un fonds d’investissement destiné aux investisseurs. Depuis ses bureaux en Israël et à Gibraltar, il se concentre sur l’Afrique, l’Amérique latine, l’Asie du Sud, le Moyen-Orient, l’Extrême-Orient et l’Europe de l’Est.
“Si nous avons pris la décision stratégique de nous concentrer sur l’art contemporain des économies émergentes c’est principalement pour trois raisons. La première est d’ordre économique : nous estimons qu’elles offrent de meilleures perspectives d’investissement à long terme. La deuxième est personnelle : le fait est que nous sommes plus intéressés par l’exploration de nouvelles cultures et que nous nous identifions davantage à l’art ancré dans la tradition et l’artisanat. Le troisième est d’ordre social : avec le budget que nous avions en tête, nous ne pouvions pas faire grand-chose dans les pays développés, alors que dans les pays en voie de développement, nous pourrions être une plateforme importante pour la promotion de nouveaux artistes et accroître dialogue et échanges avec l’Occident.
Nous avons six sous-portefeuilles régionaux, qui constituent la collection Tiroche DeLeon. La valeur nette d’inventaire du fonds que nous gérons, Art Vantage PCC Limited, dépend en grande partie de la performance des œuvres d’art de la collection. Nos investisseurs sont généralement des particuliers expérimentés et fortunés ou des family offices qui sont prêts à investir un minimum de 500 000 dollars. Certains ont déjà été exposés à l’art, mais généralement pas sur ces marchés. D’autres sont novices en matière de collection d’art et d’investissement artistique et sont intéressés par l’accès à des œuvres, l’éducation, l’emprunt d’œuvres d’art, la diversification financière et l’amélioration du style de vie que nous offrons.
L’Afrique est l’une des plus anciennes cultures artistiques et a influencé des générations d’artistes occidentaux. Elle nous a semblé sous-évaluée et sous-exposée. Ce continent représente environ 15% du total de nos investissements. Sur ces six sous-collections, le portefeuille africain a été l’un des plus performants. La performance des œuvres, brute de frais et de coûts de détention, a augmenté de 42,8% en 2013, de 10% en 2014 et de 5,41% en 2015. Nous avons bénéficié de rendements énormes en 2012-2013 principalement grâce à l’augmentation de la valeur d’artistes importants comme El Anatsui et William Kentridge. Depuis ces deux dernières années, les niveaux de prix atteints pour ces œuvres sont tels qu’il est impératif de ralentir le taux d’augmentation de la valeur pour atteindre des niveaux plus réalistes. C’est d’ailleurs ce dont témoigne la baisse des performances ..”
Galleries
Cécile Fakhoury
Galeriste à Abidjan, Côte d’Ivoire
D’origine française, Cécile Fakhoury a ouvert sa galerie éponyme en 2012 à Abidjan.
“La galerie a pour mission de promouvoir l’art contemporain sur le continent africain en développant une structure dynamique implantée localement. Espace entièrement dédié aux expositions d’œuvres d’art contemporain, c’est un lieu de découvertes, d’échanges et de rencontres. La galerie présente une nouvelle exposition tous les deux mois et a pour objectif de diffuser le travail de ses artistes à l’étranger, afin de connecter le continent africain au reste du monde et de toucher un public mondial.
La galerie vise à promouvoir une meilleure visibilité de l’art contemporain en Afrique et plus particulièrement en Côte d’Ivoire en organisant des expositions de haut niveau. Les initiatives culturelles existent ici, mais elles sont rares, surtout lorsqu’il s’agit d’opérations commerciales. Mon expérience au sein de galeries et de sociétés d’enchères en France et aux États-Unis m’a incité à développer une activité dans ce domaine lorsque je me suis installé à Abidjan.
Les galeries soutenant activement la production d’œuvres d’art et les artistes ont désormais accès à un meilleur éventail de matériaux. Selon les œuvres, nos prix varient entre 890 et 55 125$US. La qualité du travail a toujours été là, mais ressources et moyens étaient sans doute insuffisants auparavant.
La majorité de notre clientèle est constituée de collectionneurs étrangers. Cependant, nous constatons qu’un nombre croissant d’Ivoiriens suivent notre travail et soutiennent nos artistes, ce qui est très encourageant. Dès le début, l’un de nos principaux objectifs était que nos œuvres d’art pénètrent le marché local. Savoir que l’œuvre restera sur le territoire est une réelle satisfaction lorsque nous réalisons une vente.
Malgré 10 années compliquées, la Côte d’Ivoire reste un carrefour en Afrique de l’Ouest. Abidjan est une ville florissante avec un public curieux, désireux de se doter d’une scène culturelle dynamique et l’intérêt pour le marché de l’art contemporain y est croissant. Lorsque j’ai commencé, je n’avais pas les moyens d’évaluer le succès éventuel de l’initiative mais la galerie a rapidement gagné en notoriété. Près de quatre ans plus tard, les résultats sont très satisfaisants. Dès les premiers mois, nous recevions déjà près de 600 visiteurs lors des soirées d’ouverture. Nous accueillons aussi régulièrement des visites d’écoles pour chacune de nos expositions afin de sensibiliser les enfants dès le plus jeune âge.
Depuis un an, après avoir participé à trois foires et deux biennales, nous estimons que les foires d’art représentent un tiers de nos ventes annuelles. Nous prévoyons une augmentation considérable pour l’année à venir puisque nous avons l’intention de participer à cinq foires.”
Maria Varnava
Directrice de Tiwani Contemporary, Londres
” Fondée en 2011, Tiwani Contemporary travaille avec des artistes contemporains internationaux. Tiwani Contemporary expose et représente des artistes internationaux émergents et déjà reconnus, en se concentrant sur l’Afrique et sa diaspora. La galerie présente des œuvres à travers son programme d’expositions et sa participation à des foires d’art.
Outre ses activités commerciales, Tiwani Contemporary gère un programme public, Art Connect, soutenu par la fondation A.G. Leventis. Ce programme offre une plateforme de discussion sur la pratique artistique contemporaine, par le biais de publications, conférences et projets. J’ai grandi à Lagos, au Nigéria, et c’est là que s’est développé un intérêt personnel qui a finalement conduit à la naissance de Tiwani. Le langage visuel dans lequel j’ai grandi était celui de l’art nigérian.De plus, ma famille collectionnait certaines de ces œuvres et, dès mon plus jeune âge, j’ai eu la chance de rencontrer et d’interagir avec certains de ces artistes. Je vivais et travaillais au Royaume-Uni et en étais à un moment où je me cherchais quant à mes prochaines étapes professionnelles. Je voulais lancer un projet qui impliquerait quelque chose qui m’intéresserait profondément et serait un complément intéressant à la scène artistique londonienne. De plus, j’ai imaginé que ce projet comporterait, outre la partie commerciale, un fort élément de collaboration, de partage de connaissances et d’expériences. En effet, Tiwani, en yoruba, se traduit à peu près par « ça nous appartient, c’est à nous ». À ce stade, j’aimerais mentionner que Bisi Silva, fondateur et directeur du CCA Lagos, a joué un rôle dans ma décision de lancer la galerie et qu’il reste un mentor et un ami de confiance.
Outre l’élément personnel que je viens de mentionner, il était également entendu que Tiwani occuperait un « espace » important et que la visibilité serait une priorité, tout comme il était prévu qu’un espace important serait occupé et qu’il faudrait donc faire attention aux associés internes et externes de la galerie, à l’écurie d’artistes créée, à la manière dont le programme de la galerie se développerait et à la raison pour laquelle un programme public a été introduit dès le début. Enfin, un élément commercial est entré en jeu. J’ai compris que Tiwani serait un défi passionnant qui, s’il était mené à bien et avec beaucoup de travail, pourrait être un ajout solide et fructueux à mon projet. La vision à long terme est que Tiwani fasse durablement partie de cette communauté, qu’elle se développe, qu’elle construise des carrières solides et durables pour nos artistes et étende les activités de son programme public. C’est pourquoi Tiwani se concentre avant tout sur les pratiques des artistes, car c’est finalement ce qui compte le plus.
Le prix moyen varie entre 1 et 100 000 $US.
Nous travaillons avec une base de collectionneurs internationaux qui s’intéressent à la culture et l’art contemporains. En outre, certains de nos collectionneurs cherchent à créer une collection véritablement mondiale, d’où l’intérêt de notre domaine de spécialisation. Nous travaillons également avec des collectionneurs qui s’intéressent particulièrement aux artistes jeunes et émergents et trouvent notre programme passionnant à cet égard.
Il est difficile de faire la différence car les collectionneurs qu’on rencontre dans les foires finissent par acheter dans nos galeries : nous dirons donc que nous vendons approximativement 60% en galerie et 40% en foires d’art.
Je n’ai pas remarqué de changements importants en termes d’expression créative en soi, mais j’ai remarqué que de plus en plus d’artistes s’intéressent à l’exploration d’un large éventail de médias – de la performance au son en passant par la vidéo, etc. De plus, j’ai constaté que les artistes du sud sont de plus en plus intéressés par les conversations sud-sud, qu’ils ont un état d’esprit à la fois local et global et qu’ils ne regardent pas vers le nord pour engager une conversation.”